Il fait partie de ces jeunes talents qui ont porté le maillot de l'équipe de France en catégories jeunes, mais qui ont choisi une autre nation à l'âge adulte. Sauf que Loïc Nego, lui, a attendu ses 29 ans pour tourner le dos aux Bleus. Et il a opté pour un pays plutôt inattendu : la Hongrie. Rien ne prédestinait pourtant ce natif de Paris, aux parents guadeloupéens, à défendre un jour les couleurs du peuple magyar. Nego rêvait plutôt d'une carrière à la Antoine Griezmann... son ancien coéquipier en équipe de France U19, avec qui il a remporté l'Euro de la catégorie en 2010.
Loïc Nego, du centre de formation de Nantes à l'Euro avec la Hongrie
Mais tout ne s'est pas passé comme prévu pour ce grand talent formé à Nantes. Après avoir gravi tous les échelons jusqu'à l'effectif professionnel des Canaris et avec seulement 13 matchs de Ligue 2 dans les bagages, Nego fait le grand saut vers l'AS Rome. Il n'a alors que 20 ans. Mais le latéral droit n'aura jamais le bonheur de revêtir le maillot de l'équipe première des Giallorossi.
Lancé trop tôt dans un pays à la science tactique affirmée, ce dynamiteur finit par se perdre. Il enchaîne les prêts, et atterrit un peu par hasard à Videoton (Hongrie) en 2015. Une simple escale pour retrouver le chemin des grands d'Europe ? Un séjour longue durée, plutôt. Enchanté par la culture de son pays d'adoption, Nego n'en bougera plus. Au point de devenir international hongrois en octobre 2020, puis d'être sélectionné pour l'Euro... in extremis.
« Les démarches administratives ont été assez simples. Tout a commencé d’une discussion avec mon directeur sportif. Il m’a dit : "Et si tu prenais la nationalité hongroise tout en gardant ta nationalité française ? " Moi, je lui dis que si ça peut aider le club (les formations ont un quota de joueurs hongrois à respecter, ndlr), pas de problème. Je ne pensais pas à l'équipe nationale. Prendre la nationalité, c’était normal pour moi. J'étais dans le pays depuis longtemps, je me sentais comme à la maison. Derrière, j’ai fini meilleur joueur du championnat. J'ai reçu le trophée des mains du président de la fédération avec lequel j’ai échangé quelques mots. Quelques mois plus tard, je suis appelé en sélection de Hongrie et l’histoire commence. Le sélectionneur m'avait dit : "je n’attends que le feu vert (des autorités) et je t’appelle"."
Loïc Nego à Onze Mondial
Loïc Nego, la Hongrie dans le cœur
Et la belle histoire de Loïc Nego avec la Hongrie ne fait que commencer. Le 12 novembre 2020, le Français est appelé pour prendre part au match de la décennie pour la Hongrie : le barrage qualificatif pour l'Euro. Face à l'Islande, le joueur du MOL Fehérvár assiste depuis le banc à l'écroulement des siens. Alors que leur adversaire mène 1-0, le sélectionneur magyar joue son va-tout en lançant Nego dans la bataille à six minutes de la fin du match...
Quatre minutes plus tard, l'ailier droit est pris d'une illumination. Le prophète libère son peuple d'adoption en égalisant. Qui d'autre ? Car si Dominik Szoboszlai délivrera les siens dans le temps additionnel pour qualifier la Hongrie (2-1), c'est bien "le Hongrois qui n'aurait jamais dû l'être" qui devient le héros national.
"Ici, on m’apprécie, ça me fait chaud au cœur. Je me sens Hongrois dans mon métier, dans ce que je fais, je me suis imprégné du mode de vie et des habitudes. Mes enfants ont des amis hongrois. Clairement, je me sens aimé. On se bat tous pour la même cause : la victoire de notre équipe. Le plus important, c’est de mouiller le maillot."
Loïc Nego à Onze Mondial
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France ou Hongrie ? Loïc Nego a fait son choix au moment de retrouver les Bleus
Et à l'heure de retrouver les Bleus en phase de groupe de l'Euro, ce samedi 19 juin, Nego a toutes les raisons d'être bouleversé émotionnellement. Mais il l'assure : nationalité française ou pas, seule la Hongrie résonnera dans son cœur ce samedi.
"Ce match va avoir une saveur particulière pour moi (ému). Je n’ai même pas les mots pour te décrire ce que je ressens. Ce sera un moment magique. Je pense à mes proches qui seront excités de me voir avec un autre maillot que celui de la France. (...) Je suis humain, je ne peux pas te dire : "je suis fort, je ne vais pas me laisser dépasser par les émotions." En tout cas je vais tout faire pour éviter ça. Retrouver Griezmann au moment de la poignée de main va me faire bizarre. Mais dès que l’arbitre va lancer le match, il n’y aura plus de Griezmann, plus rien. Sur le terrain, France ou pas, je m’en fous. C'est seulement après la partie qu'on va parler, rigoler, se retrouver."
Loïc Nego à Onze Mondial
Marquer contre la France ? "Je ne vais pas me gêner"
Marquer contre la France, Nego y croit même dur comme fer. Une revanche contre l'histoire ? Non, un simple acte du "destin" pour le Franco-Hongrois de 30 ans.
"Si je peux marquer, je ne vais pas me gêner. J’aimerais bien qu’on se souvienne de moi après cet Euro. Tout ce qui se passe et m’arrive, c’est le destin. Dans le football, c’est souvent comme ça, c’est bizarre. Il se passe toujours des choses inexplicables, personne ne peut expliquer le destin. Je peux te citer plein d’exemples du joueur qui n’a pas signé dans un club puis qui affronte le même club en finale et fait gagner son équipe."
Loïc Nego à Onze Mondial
Les Bleus sont prévenus, et il n'y aura pas de "Nego" au moment de planter le coup de poignard...