Certains n'y verront qu'une simple coïncidence, d'autres un véritable signe du destin. En rejoignant Limassol, ville jumelle de Marseille, Mathieu Valbuena (38 ans) a peut-être cet été bouclé la boucle d'une carrière débutée il y a désormais deux décennies. Après quatre saisons disputées sous les couleurs de l'Olympiakós, l'ancien international français (52 sélections, 8 buts) a souhaité se lancer un nouveau défi. Le dernier ? Peut-être. Mais toujours avec la même passion.
Mathieu Valbuena, son arrivée à Chypre, sa longévité...
« Vous vous êtes récemment engagé avec l’Apollon Limassol. Comment se déroule votre adaptation à cette nouvelle vie chypriote ?
Ça va très bien. On travaille encore pour obtenir les résultats voulus. Il y a beaucoup de nouveaux joueurs et il faut que la mayonnaise prenne. Mais je pense qu’au fil des entraînements et des matchs, avec les idées d’un très bon coach (Bogdan Andone, qui a depuis été remercié et remplacé par Vladan Milojević, ndlr), on parviendra à mieux construire notre jeu. Ici, il faut surtout parvenir à s’adapter aux conditions climatiques. Il fait très chaud, mais aussi très humide.
Vous fêterez prochainement votre trente-neuvième anniversaire. Comment expliquez-vous une telle longévité dans le football professionnel ?
Prendre du plaisir et jouer avec passion sont selon moi les choses les plus importantes. J’ai toujours rêvé de devenir footballeur professionnel. C’est aussi la raison pour laquelle je fais très attention à mon hygiène de vie. Ça me permet justement d’avoir une telle longévité. Je suis heureux de me lever le matin, d’aller à l’entraînement, d’avoir le ballon au pied. Je ne ressens aucune forme de lassitude. J’ai aussi la chance que mon physique ne me fasse pas défaut. Je n’ai plus mes jambes de vingt ans, mais pour quelqu’un qui va sur sa trente-neuvième année, je me trouve plutôt pas mal (rires).
Votre passion pour le football est-elle restée la même qu’à vos débuts ou a-t-elle évolué avec le temps ?
Je pense que l’âge avançant, ma passion ne s’en est trouvée que renforcée. Les années aident à évoluer, on voit les choses différemment, notre style de jeu s’adapte également. C’est vrai que je mets plus de temps à récupérer qu’avant, mais le plaisir que je prends en jouant au football dépasse toute forme de fatigue.
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Comment adaptez-vous aujourd’hui votre style de jeu vis-à-vis de votre condition physique ?
Je suis un créateur, un numéro 10, je dois apporter offensivement. La répétition d’efforts à haute intensité est parfois un petit peu compliquée. Qui plus est ici, à Chypre, où je me suis rendu compte que les conditions climatiques sont particulières. Mais il faut savoir s’adapter, éviter les courses inutiles. On fait peut-être moins d’efforts, mais ceux que nous faisons, on les fait à fond.
Vous qui avez évolué en Grèce lors des quatre dernières saisons, avez-vous été surpris de la qualification du Panathinaïkós face à l’OM ?
Si on se penche sur les trois ou quatre dernières années, l'Olympiakós a d'ailleurs toujours disputé la coupe d’Europe, on a battu l’OM à domicile en Ligue des champions... je pense que les équipes françaises ont tendance à mésestimer ces équipes-là, mais quand elles jouent des matchs de coupes d’Europe, elles sont souvent surprises. La ferveur du public est également un facteur à prendre en compte.
Surpris ? À moitié. En France, on a peut-être tendance à sous-estimer le niveau du championnat grec. Mais au vu des matchs, je pensais que l’OM, en dépit du contexte (nouveaux joueurs, nouvel entraîneur, début de saison), parviendrait à se qualifier. Après, je pense que le niveau de la Super League (le championnat grec, ndlr) a évolué. Ce n’est peut-être pas le championnat le plus reconnu, mais il y a tout de même de très belles équipes.
Avez-vous reçu d’autres offres que celle de l’Apollon ?
En France, j’ai reçu des offres de clubs évoluant en Ligue 2. J’ai aussi eu des sollicitations à l’étranger. Des propositions sont également venues de Grèce, mais il était pour moi hors de question de jouer ailleurs qu’à l’Olympiakós.
Qu’est-ce qui vous a convaincu de rejoindre Limassol ?
À Chypre, j’ai l’opportunité de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture. J’ai eu les dirigeants au téléphone, ils m’ont convaincu avec un projet séduisant. Limassol est un club familial de renom, ici, à Chypre. Et malgré la saison difficile que vient de traverser l’Apollon, c’est une équipe qui dispute régulièrement la coupe d’Europe, qui joue des derbys, qui peut compter sur la ferveur de son public. Il était également important pour moi de pouvoir jouer, de sentir que je pouvais apporter quelque chose à mon nouveau club. C’est quelque chose que je voulais retrouver.
« Tout ce que j’ai vécu à l’Olympique, les titres que j’y ai gagné, ça restera gravé à jamais dans ma mémoire »
Quels sont désormais vos objectifs ?
Je viens ici pour réussir. Tous les compteurs sont remis à zéro, c’est un beau challenge pour moi. Je peux dire que j’ai réussi dans tous les clubs par lesquels je suis passé. Quand j’arrive quelque part, je veux m’investir à 100%. Je pense que je peux apporter du caractère et de l’expérience, je veux gagner un titre avec l’Apollon. Je ne suis pas venu à Chypre pour être en vacances.
Les plus beaux souvenirs de sa carrière
Vous avez une grande carrière derrière vous. Mais quel en reste le plus beau moment ?
J’en ai vécu plusieurs (rires). C’est vrai que l’Olympique de Marseille restera un grand chapitre de ma vie, de ma carrière. C’est là où tout a commencé, ça a été quelque chose d’extraordinaire pour moi. Je me suis révélé à Marseille, j’y ai obtenu mes premières sélections en équipe de France. J’ai vécu une première saison compliquée, mais mon premier but a été un grand moment pour moi. C’était contre Saint-Étienne, ça avait permis à l’OM de se qualifier en Ligue des Champions. Celui contre Liverpool fait également partie des moments dont je me souviens particulièrement. Tout ce que j’ai vécu à l’Olympique, les titres que j’y ai gagné, ça restera gravé à jamais dans ma mémoire.
Avez-vous des regrets ?
Non. J’ai toujours tout donné, je n’ai jamais triché et je continuerai à le faire jusqu’à la fin. Après, il est vrai que ma fin d’aventure avec l’équipe de France m’a beaucoup attristé. Jouer pour son pays est quelque chose d’extraordinaire. J’ai eu la chance de disputer deux Coupe du Monde et un championnat d’Europe avec ma sélection, c’est quelque chose d’incroyable. J’aurais voulu avoir une sortie différente, j’ai été très attristé, mais il faut savoir se remettre de ses déceptions et aller de l’avant. Le seul véritable regret que je pourrais avoir est de ne pas avoir pu jouer en Espagne, le pays natal de mon père. Je pense que la Liga est un championnat où j’aurais pu m’épanouir.
Vous avez déjà déclaré avoir « peur que tout s’arrête ». Les années passant, cette peur s’est-elle intensifiée ?
Oui et non car on s’y prépare. On sait qu’il y aura une fin, bien qu’on essaye de la repousser au maximum. Je suis toujours parti du principe que je ne forcerais pas si je ne me sentais plus capable d’assurer sur le terrain. Je ne pourrais pas accepter que les gens puissent me voir me traîner sur un terrain.
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Vous avez signé un contrat pour une saison. Pensez-vous que ça puisse être la dernière aventure de votre grande carrière ?
C’est probable. Après dans le foot, on ne sait jamais. Quand j’ai signé à l’Olympiakós, j’allais bientôt fêter mes 35 ans, je n’avais signé que pour un an et je n’aurais jamais pu imaginer que j’allais y rester pendant 4 ans. Je me projette simplement sur mon contrat, sur les objectifs de l’équipe. Je ne veux pas me prendre la tête, mais m’épanouir.
Si le Mathieu Valbuena d’aujourd’hui avait un conseil à donner à celui de 20 ans, quel serait-il ? Et inversement si le jeune Mathieu Valbuena devait en donner un à celui d’aujourd’hui.
Je pense que c’est d’abord se rendre compte que l’on fait le plus beau métier du monde. On souffre, mais souffrir c’est bon. On vit pour les émotions, on vit pour gagner. Le meilleur conseil que je puisse donner aux jeunes joueurs est de prendre du plaisir car les années passent très vite. Je leur dirais également de faire attention à leur entourage. Une carrière ne se résume par qu’au terrain, il faut aussi savoir contrôler sa vie en dehors, même si ce n’est pas toujours facile. »