Jaumes Roures auditionné à l'Assemblée Nationale

Le groupe espagnol Médiapro avait acheté les droits de diffusion télévisée de la Ligue 1 pour un montant de près de 800 millions d’euros. Incapable de payer les sommes promises, il avait dû se retirer à la fin de l’année 2020 alors que la Ligue de football professionnel avait décidé de refuser une renégociation du contrat. La défaillance de l’ancien diffuseur avait fait plonger le football hexagonal dans une crise financière profonde et sans précédent.

Jaumes Roures est revenu hier, jeudi 16 septembre, sur cet échec lors de son audition par la mission d’information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives. Il s’est alors expliqué sur le contexte particulier qui avait fait capoter l’accord avec la Ligue. Entre la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 et la crise économique engendrée, le dirigeant espagnol n’a éludé aucune question. Pendant 1 h 30, face aux députés Cédric Roussel (La République en Marche) et Régis Juanico (Génération.s), il a tenté de justifier l’abandon de la diffusion de la Ligue 1 et de la Ligue 2 au beau milieu de la saison 2020-2021.

La LFP ne voulait pas renégocier les droits

Devant les parlementaires, Jaumes Roures a affirmé que Mediapro n’avait pas voulu se retirer, mais que, devant le refus de la Ligue de renégocier, le groupe espagnol n’avait pas eu le choix. Le monde du football, mis à mal par la crise sanitaire avec l’arrêt des matches et l’absence de public dans les stades, traversait une période inédite. Alors que dans certains championnats européens, les droits TV avaient été revus à la baisse, la LFP ne voulait pas en entendre parler.

Médiapro désirait une remise de 200 millions d’euros. Pour Jaumes Roures, cet effort ne représentait pas un énorme sacrifice pour les clubs français.

" Ça équivaut à sept millions d'euros pour chaque club de Ligue 1 et trois millions d'euros pour un club de Ligue 2. Personne ne peut me dire que c'est impossible dans une situation de Covid qu'un club coupe à ce niveau dans son budget", a t il déclaré jeudi avant d'ironiser : "Ça veut dire qu'il y aura des joueurs qui auront une Maserati plutôt qu'une Ferrari. On discute de ça, de rien de plus. Le reste, c'est du bruit ! "

Jaumes Roures lors de son audition à l'Assemblée Nationale

Jaumes Roures fustige Canal+

Le dirigeant catalan a également décidé de revenir sur l’attitude de Canal+. Selon lui, la groupe français a volontairement fait en sorte de rendre les choses difficiles. " Notre objectif était que notre chaîne Téléfoot soit hébergée par Canal+, on savait qu'un accord était possible. On n'est pas des ennemis, on est des producteurs de télévision. " 

L’arrêt de Médiapro avait compliqué la vie des clubs professionnels. En effet, ces derniers comptaient beaucoup sur la manne financière promise lors de la signature des contrats avec la LFP. Jaumes Roures a expliqué quel était initialement le principe d’évolution de leur business plan. " Nous avions bâti un business plan sur 4 saisons. On savait qu'on allait perdre de l'argent la première année et gagner de l'argent lors des troisième et quatrième années. On savait qu'on n'aurait pas 3 millions d'abonnés comme ça. Notre objectif n'était pas de piquer des abonnés à Canal+ ou à d'autres mais que la chaîne soit chez Canal+ et chez d'autres opérateurs. " 

Enfin, toujours sur l’attitude de Canal+, Jaumes Roures a enfoncé le clou.

" Quelle a été l'attitude de Canal+ avec la LFP après notre départ? Je ne vais pas dire du chantage, mais une pression insupportable avec des offres fantômes. C'est comme un enfant qui n'est pas très bien éduqué. On parle pourtant d'un empire, pas d'une petite entreprise. (...) Si tu as mis des milliards pendant 30 ans sur le foot et que ton produit ne s'est pas amélioré, c'est que tu as un problème. "

Jaumes Roures lors de son audition à l'Assemblée Nationale

La LFP ne pouvait pas se retourner contre Mediapro

Quant à la question de comprendre pourquoi la LFP n’a pas pu se retourner vers la maison mère, la société Imagina Media Audiovisuel, Jaumes Roures dévoile une réponse claire. " Parce qu'on est allé au tribunal de commerce de Nanterre expliquer la situation. Le tribunal a compris, a ouvert la conciliation et a lancé ce processus sans qu'on active la garantie. beIN Sports a lancé le même processus dernièrement. On a utilisé la loi et les pouvoirs publics pour résoudre une situation. "

Le football français traverse une crise majeure depuis l’arrêt de Mediapro. Les explications de Jaumes Roures permettront peut-être de mieux comprendre la démarche du groupe espagnol lorsque ce dernier a cessé de retransmettre les rencontres. Par contre, elles ne permettront clairement pas de régler les graves soucis financiers traversés par de nombreux clubs.