L'équipe de France olympique ne s'est-elle pas vu trop belle ? Était-ce vraiment raisonnable de parler "d'aller chercher une médaille " aux JO ? La lourde défaite concédée d'entrée de jeu contre le Mexique (1-4), ce jeudi 22 juillet, a fracassé quelques illusions côté français. Car les Bleus n'ont pas seulement trébuché, ils ont aussi et surtout affiché des limites indignes d'un candidat au podium. Mais il ne faut pas pour autant crier défaite trop vite. Ce revers initial était prévisible contre un adversaire supérieur. Ce sont les prochaines rencontres contre l'Afrique du Sud (dimanche 25 juillet) et le Japon (mercredi 28 juillet) qui seront plus révélatrices pour savoir si ces Bleus peuvent croire à l'exploit.

L'équipe de France n'a jamais été un favori, ni même un outsider

Rome ne s'est pas faite en un jour... et l'équipe de France olympique non plus. Certes, ce groupe - pourtant très hétéroclite - a déjà trouvé une vraie harmonie, comme l'a confirmé André-Pierre Gignac à L'Equipe, mercredi 21 juillet. Mais cela se saurait si des bonnes ondes suffisaient à décrocher un podium olympique. Les Bleus ont-ils déjà oublié à quel point cette équipe a été bricolée en catastrophe ? La plupart des joueurs présents à Tokyo ne sont que des seconds couteaux et des roues de secours. Loin, très loin des Camavinga, Upamecano, Konaté, Aouar, Ikoné, Gouiri ou Diaby espérés. Le sélectionneur Sylvain Ripoll a même dû piocher en Ligue 2 (avec Alexis Beka Beka) pour faire le nombre.

Le latéral gauche de l'OL Melvin Bard (à gauche), entré en jeu contre le Mexique, ne compte que 15 matchs de Ligue 1, dont 4 seulement en tant que titulaire. Alexis Beka Beka (à droite), lui, n'a jamais connu que la Ligue 2 avec Caen. Icon Sport
Le latéral gauche de l'OL Melvin Bard (à gauche), entré en jeu contre le Mexique, ne compte que 15 matchs de Ligue 1, dont 4 seulement en tant que titulaire. Alexis Beka Beka (à droite), lui, n'a jamais connu que la Ligue 2 avec Caen. Icon Sport

Outre les vieux briscards Gignac, Thauvin et Savanier, les fers de lance de cette équipe se nomment Arnaud Nordin (Saint-Etienne) en attaque, Lucas Tousart (Hertha Berlin) et Enzo Le Fée (Lorient) au milieu, Pierre Kalulu (AC Milan) en défense et Paul Bernardoni (Angers) dans les buts. Rien de bien effrayant... Mais au-delà du niveau intrinsèque, c'est surtout le vécu commun de ces joueurs qui pose question. La plupart de ces joueurs se sont rencontrés pour la première fois il y a trois semaines. Pour la création d'automatismes et de complicité sur le terrain, on repassera...

Les JO : une découverte, un choc

Mais les Bleus semblent aussi avoir négligé la portée de l'événement. Les Jeux Olympiques ne sont pas n'importe quel tournoi. Cela ne ressemble en rien à ce que tous les joueurs de l'équipe de France ont connu jusqu'à présent, comme le soulignait Florian Thauvin à L'Equipe. "C'est totalement différent de ce qu'on a l'habitude de connaître. Normalement, on est au vert et on ne croise personne. Là, on mange tous ensemble au self avec les autres athlètes. C'est vraiment un autre monde. On découvre en même temps la vie de tous les autres sports." Exit le confort des traditionnelles chambres d'hôtel, place aux chambres d'appartements "pas du tout isolées" (Thauvin) où "un réveil qui sonne réveille tout le monde le matin" (Gignac).

Le latéral gauche de l'OL Melvin Bard (à gauche), entré en jeu contre le Mexique, ne compte que 15 matchs de Ligue 1, dont 4 seulement en tant que titulaire. Alexis Beka Beka (à droite), lui, n'a jamais connu que la Ligue 2 avec Caen. Icon Sport
André-Pierre Gignac et les Bleus doivent encore trouver leurs repères aux JO, un événement qu'ils découvrent. Icon Sport

Les Jeux Olympiques sont un événement à part, et on ne peut pas en vouloir aux Bleus de se sentir déboussolés. Cela faisait près de 25 ans que l'équipe de France masculine n'avait plus mis un pied aux JO. A l'inverse, le Mexique, vainqueur de l'avant-dernière édition (2012) et encore présent à Rio il y a cinq ans, a fait valoir sa science de l'événement contre les Bleus. D'autant que la Tri, contrairement à la France, a pu envoyer ses meilleurs éléments comme à chaque édition. "Au Mexique, il y a une mentalité et une vision des choses différentes. Pour eux, disputer les Jeux est à la fois une fierté et un objectif. En France, on a vu comment ça s'est passé... " , expliquait "Flotov" à L'Equipe, tandis que Gignac confirmait que "tous les clubs mexicains ont lâché leurs joueurs." Dans ces conditions, et sous une chaleur de plomb, rien de plus logique que les uns se soient sentis submergés par l'événement, tandis que les autres déroulaient une musique bien connue...

Des Bleus mieux préparés psychologiquement contre l'Afrique du Sud et le Japon ?

Les Bleus ont donc, comme prévu, connu un crash test douloureux. Mais le plus dur est maintenant derrière eux. Le gros morceau de la poule a été affronté, le baptême du feu a été passé, place désormais à deux adversaires plus abordables : l'Afrique du Sud et le Japon. Si les deux nations étaient déjà de la partie aux JO 2016, mais elles n'avaient pas réussi à franchir le premier tour. Quant aux Bleus, après une préparation aussi courte, ils vont logiquement monter en puissance physiquement. Les hommes de Sylvain Ripoll vont aussi progressivement surmonter un "décalage horaire très fort à encaisser" , dixit Gignac. "Le corps a besoin de temps. Il faut prendre en compte la chaleur" , prophétisait déjà le buteur des Tigres.

Le latéral gauche de l'OL Melvin Bard (à gauche), entré en jeu contre le Mexique, ne compte que 15 matchs de Ligue 1, dont 4 seulement en tant que titulaire. Alexis Beka Beka (à droite), lui, n'a jamais connu que la Ligue 2 avec Caen. Icon Sport
L'équipe de France de Téji Savanier (à gauche), André-Pierre Gignac, Anthony Caci (n°17) et Florian Thauvin doit se focaliser sur un objectif plus raisonnable. Icon Sport

L'équipe de France, cependant, ne pourra pas se transformer en machine de guerre en quelques jours. Mais elle sera au moins mieux armée émotionnellement. Et psychologiquement. Car les Bleus ont été remis la tête à l'endroit par un Mexique qui leur a montré comment devenir un vrai prétendant au podium. Les jeunes français, mais aussi leur sélectionneur (trop confiant avant ce premier test ?) ont brutalement mesuré tout le chemin qu'il leur restait à parcourir pour aller chercher la médaille espérée. Et c'est sans doute ce dont ils avaient besoin pour continuer (ou commencer) à croire en leur rêve.