Et dire que pour une fois, la Turquie ne s'est pas cachée. Vaillants, hardis, prêts à tout donner, les partenaires de Burak Yılmaz se sont envoyés comme rarement... pendant 5 minutes. Le temps pour la Suisse, qui n'avait rien montré jusque-là, d'ouvrir le score. Tout un symbole de la fébrilité extrême de la Turquie dans cet Euro 2020, d'abord dévorée par l'Italie (0-3) puis baffée par le pays de Galles (0-2). L'un des plus gros outsiders de ce tournoi, qui visait "la première place" de son groupe (comme l'avait annoncé son sélectionneur Şenol Güneş), repart donc avec un zéro pointé et le sentiment d'un immense gâchis.
La Suisse, quant à elle, a d'abord été fidèle à elle-même en se montrant réaliste. Mais elle a ensuite montré de très jolies choses offensivement, qui peuvent lui laisser espérer pour la suite... si suite il y a. En effet, malgré sa victoire séduisante du soir, la Nati échoue à la troisième place de son groupe. C'est le pays de Galles qui a gardé sa deuxième place qualificative, à la différence de buts, en ne concédant qu'une courte défaite (0-1) face à l'Italie dans le même temps. La Suisse (4 points) se retrouve donc en salle d'attente pour espérer finir parmi les quatre meilleurs troisièmes de groupes.
La Turquie cueillie à froid, la Suisse se chauffe
C'est donc la Turquie, en mission commando, qui avait lancé les hostilités dès le premier coup de sifflet. Les hommes de Güneş annoncent la couleur en tirant dans tout ce qui bouge : c'est un bombardement qui attend Yann Sommer. Problème : cette vaillance ne semble réservée qu'à l'autre bout du terrain. Car les défenseurs turcs, eux, ne voient manifestement pas l'intérêt de l'utiliser pour repousser leurs assaillants. Ainsi, dès la première incursion suisse, une passivité navrante de l'arrière-garde turque permet à Seferović d'ouvrir le score (1-0, 6e).
Si la Turquie réagit grâce à une nouvelle frappe du percutant latéral gauche Müldür (16e), c'est surtout la Suisse qui prend confiance. D'habitude assez conservatrice, la Nati surprend agréablement ses suiveurs en se projetant vite et bien vers l'avant. Shaqiri, d'une frappe enroulée dont il a le secret (mais de son mauvais pied), récompense ainsi cette belle dynamique (2-0, 26e). A peine le temps de souffler que la Suisse vole déjà vers le 3-0, sauf que l'attaquant de Liverpool perd son face-à-face devant Çakır (29e). Au fond du trou, la Turquie se redresse à l'orgueil. Mais Sommer, qui l'avait déjà frustrée en début de partie, écoeure une nouvelle fois l'intenable Müldür (33e, 42e).
Suspense sitôt relancé, sitôt plié
45 minutes pour tout faire péter et se racheter auprès de ses supporters ? La Turquie en est loin. Anesthésiée au lieu d'être déchaînée, Ay-Yıldızlılar ne peut assister qu'impuissante au retour en trombe de la Nati. Çakır doit ainsi se détendre face à Embolo (51e), alors que Shaqiri se foire en excellente position (57e). Mais puisque les artistes sont de sortie, Kahveci se joint à la fête et relance la partie d'une merveille de loin en pleine lucarne (2-1, 62e).
Un exploit individuel, c'est tout ce qui était en mesure de réveiller cette Turquie dans le formol, qui ne semble même pas y croire. La preuve : Shaqiri se charge d'enterrer ses illusions seulement six minutes plus tard (3-1, 68e). A noter la nouvelle passe splendide de Zuber, qui signe sa troisième passe décisive de la soirée.
Mais les Suisses n'ont en pas fini avec leur victime du soir : ils doivent marquer le plus possible pour ravir la deuxième place au pays de Galles. C'est d'abord le poteau qui frustre Xhaka (77e) sur un coup franc de mammouth, puis le corps arbitral qui oublie un penalty sur ce même Xhaka dans la foulée. La Suisse devra s'en contenter : elle finit troisième de son groupe avec 4 points et une différence de buts de -1. Suffisant pour finir parmi les quatre meilleurs troisièmes ?
La fiche du match
Suisse 3 - 1 Turquie
Buts : Seferović (6e), Shaqiri (26e, 68e) pour la Suisse / Kahveci (62e) pour la Turquie
Suisse (3-4-2-1) : Sommer - Elvedi, Akanji, Rodriguez - Widmer, Xhaka, Freuler, Zuber - Shaqiri (76e, Vargas) - Embolo, Seferović (75e, Gavranović).
Turquie (4-3-3) : Çakır – Çelik, Demiral, Söyüncü, Müldür – Ahyan (64e, Yokuşlu), Kahveci (80e, Kökçü), Tufan (65e, Yazıcı) – Ünder (80e, Karaman), Yılmaz, Çalhanoğlu.